Le piège de la comparaison entre photographes
Photo Stef Kocyla

J’ai eu l’occasion de discuter avec quelques-uns de mes confrères dernièrement. J’ai passé deux semaines en Norvège où j’ai rencontré des personnes formidables, issues de tous les horizons et de tous les coins de la planète. Littéralement.

Nos discussions tournaient autour de notre photographie bien sûr, mais aussi sur ce qui nous motivaient les uns et les autres dans cette discipline.

Ces discussions étaient passionnantes, nous avons échangé sur nos endroits préférés, nos succès, nos échecs, nos projets…

Bien évidemment, lorsque vous rencontrez quelqu’un avec qui vous avez des affinités, avec qui le courant passe bien, vous voulez rester en contact avec lui.

C’est à ce moment que l’on s’échange nos adresses sur les réseaux sociaux. Mais c’est aussi à ce moment qu’on peut tomber dans un piège dangereux…celui de se comparer.

1. Pourquoi se compare-t-on ?

Nous nous comparons aux autres depuis notre plus jeune âge. Ce réflexe comparatif est entretenu par nos parents qui, consciemment ou inconsciemment, nous ont comparé aux autres.

Cette interrogation n’est pas récente non plus. Déjà au 17es. Spinoza se posait des questions, dans son Traité sur l’Éthique, sur ce réflexe qui ne provoque que des « passions tristes » comme l’envie, la haine, la tristesse, le manque d’estime de soi…

Le piège de la comparaison entre photographes
Photo by Tinh Khuong on Unsplash

À l’ère des réseaux sociaux, ce réflexe est devenu toxique.

Mais alors pourquoi se compare-t-on ? Il est vrai que notre société fait beaucoup pour alimenter notre désir de compétition, mais cela est-il nécessairement un poison ?

Le besoin de s’auto-évaluer

Nous avons besoin d’évaluer nos œuvres et nos performances par rapport à ceux qui nous ressemblent.

En sport, c’est exactement ce qui se passe dans un match de tennis, dans une course cycliste ou dans un concours de saut en longueur.

La photographie n’échappe pas à la règle. Nous choisissons nos modèles pour nous construire en tant que photographe, et nous leur empruntons ce que nous jugeons de plus idéal chez eux.

Nous fonctionnons principalement par mimétisme.

Le besoin de s’estimer à sa juste valeur

À l’école, une note de 12/20 en français est perçue différemment si la moyenne de classe est de 8/20 ou si elle est de 17/20.

Herbert W. Marsh, psychologue de l’éducation, a ainsi défini l’effet Big Fish Little Pond Effect (B.F.L.P.E) : le même poisson se sent énorme dans une petite mare et minuscule dans l’immensité de l’océan.

Nous avons besoin d’avoir une bonne estime de nous-mêmes pour nous épanouir dans notre art.

Le besoin de progresser

Nous avons besoin de nous connaître pour nous améliorer. Le sociologue américain Leon Festinger a mis en évidence dans les années 50 la théorie de la comparaison sociale.

Nous nous comparons à celui que nous considérons comme supérieur pour nourrir nos ambitions – il s’agit de la comparaison ascendante – et nous nous comparons à ceux plus malheureux pour nous réconforter et relativiser nos propres échecs – c’est la comparaison descendante.

2. Les effets toxiques de la comparaison

Si se comparer aux autres est instinctif et inévitable, lorsque nous nous comparons sans arrêt aux autres photographes, nous prenons en fait le risque de voir des effets destructeurs se produire…

C’est particulièrement vrai sur les réseaux sociaux. Ils sont à utiliser avec précaution.

Le piège de la comparaison entre photographes
Photo by Marc Schäfer on Unsplash

Au lieu de nous donner une référence et de nous permettre de nous évaluer, ils nous envoient de faux indicateurs. Notre jugement est alors faussé, et nous avons une mauvaise perception de ce nous produisons.

Au lieu de nous donner une bonne estime de nous-mêmes, ils nous donnent le sentiment inverse. Pourquoi ? Parce que les réseaux sociaux nous renvoient une vision biaisée de la réalité.

La vie parfaite de nos amis, leurs jobs de rêve, leur popularité sur Instagram, leur bonheur quotidien ne sont que des illusions. On nous impose une comparaison ascendante, avec des individus qui n’ont rien d’exceptionnel dans la vraie vie.

Naïvement, nous supposons que si nous ne sommes pas au plus haut niveau, nous ne valons pas grand-chose.

Bien évidemment, dans ces conditions, il n’y a pas de progression possible. Et vous serez tentés de faire des photos qui seront populaires sur Instagram, au lieu de faire des photos qui vous plaisent à vous.

Vous ne créez plus, vous copiez.

Et dans le pire des cas, vous ne faites plus rien.

3. Comment éviter le piège ?

Vous l’avez compris, l’utilisation des réseaux sociaux pour se comparer est destructeur.

Cependant, nous avons besoin d’évaluer notre travail photographique, nous avons besoin d’avoir une bonne estime de nous-mêmes et nous avons besoin de progresser.

Alors comment le faire sans danger ?

Tout d’abord, il faut limiter l’utilisation de ces réseaux à ce qu’ils sont vraiment : un lien social.

Au lieu de vous comparer aux autres photographes sur ces réseaux, cherchez plutôt à entrer en contact avec eux. Rapprochez-vous d’eux, cela va éliminer, ou tout au moins réduire, ce complexe d’infériorité.

Vous devez bien comprendre que ce que vous voyez des autres sur les réseaux sociaux n’est que la partie émergée de l’iceberg.

Tout le monde vit avec ses problèmes, tout le monde connaît des galères, tout le monde connaît des échecs, tout le monde vit des drames.

Seulement, vous ne les voyez pas.

Sur les réseaux sociaux, vous ne voyez que ce que l’on veut bien vous montrer.

Relativisez votre situation, vos performances et votre valeur en vous disant que personne n’échappe aux contraintes et aux difficultés de la vie.

Ensuite, passez moins de temps sur ces réseaux. Utilisez une app qui vous donnera le nombre d’heures passées dessus.

Vous allez halluciner.

Ce sont autant d’heures (ramenez ça au mois ou à l’année, c’est encore plus impressionnant) que vous ne passez pas à créer.

Toutes ces heures, ces journées entières, en heures cumulées, où vous pourriez faire autre chose de plus productif. Formez-vous par exemple, pratiquez la photo bien sûr, ou encore faites une autre activité saine, comme faire du sport ou pratiquer la méditation.

Depuis que je me suis discipliné, ma vie a changé. En beaucoup mieux.

Je ne consulte plus mon téléphone toutes les 5mn, il est éteint le plus souvent. Idem avec ma boite emails. Je ne la consulte que 3 fois par jour. J’ai mis en place une véritable discipline de travail et supprimé les distractions.

J’ai considérablement amélioré mon hygiène de vie. Et ma santé mentale.

Conclusion

En fin de compte, après avoir pris conscience de nos comportements, nous pouvons agir pour éviter d’être victime d’un système qui pervertit la réalité.

J’aime dire que j’aborde ma photographie en ayant l’esprit de l’expert, mais avec l’œil du débutant.

Rester ouvert à toutes les possibilités et réduire l’influence de l’Ego.

Se fixer des objectifs est aussi un très bon moyen de progresser, sans se comparer aux autres. Et si vous voulez comparer quelque chose, comparez votre travail d’il y a 1 an à celui d’aujourd’hui. Ce sera plus parlant.

En adoptant le bon état d’esprit, une attitude positive, vous entrerez dans une bonne dynamique, un cercle vertueux. La comparaison peut être source de progrès et d’épanouissement, à condition d’être bien utilisée.


Stef Kocyla

https://aventures-de-photographe.fr

Moi c’est Stef, j’ai toujours aimé faire des photos, mais j’ai commencé sérieusement à en faire en 2015, à l’occasion d’un voyage en Amérique du Nord.

Ce qui était un loisir est devenu une passion et aujourd’hui la photo fait partie de mon mode de vie.

Voyager est mon autre passion : partir à l’aventure, sac à dos, en road-trip, dans les plus beaux coins de la planète, le plus souvent sauvages. Début 2018, de gros soucis de santé me font revoir mes priorités et je décide de me consacrer à 100% à mes 2 passions. La vie est courte. La photo de paysage et les voyages font partie de mon ADN, combiner les 2 était donc une évidence.

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Instagram : @stef_kocyla

Facebook : https://www.facebook.com/aventuresdephotographe

Twitter : @SKocyla

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